Inutile de s’appesantir davantage sur
l’horreur, les faits parlant d’eux-mêmes : Hervé Cornara, paisible chef
d’entreprise, décapité en Isère (France) par un fou furieux du nom de Yassin
Salhi, au nom d’un califat islamique dont le moins qu’on puisse
prétendre est qu’il n’a plus grand-chose de carnavalesque. Et ce dernier
de se prendre en photo avec la tête du défunt et de faire circuler le
tout sur les réseaux sociaux. D’où… polémique : les médias officiels
doivent-ils ou non flouter le macabre trophée avant publication ?
Le parquet de Paris vient d’ouvrir une enquête à ce sujet. À leur
façon, ces mêmes médias se sont aussi interrogés. Que faire ? Flou ou
pas flou ? Montrer l’épouvante ou la dissimuler ? Pour l’instant, c’est
flou.
Il est un fait que devant tel dilemme, il n’est pas illicite de
barguigner, quels que soient les objectifs, réels ou supposés, des
protagonistes en question.
Première option ? Adoucir l’affaire, quitte à l’affadir, afin que
veuve et orphelins n’aient pas à supporter la vue d’une tête tranchée,
celle du mari, celle du père. Là, il est possible d’atténuer le légitime
chagrin ; mais du drame ne demeure plus qu’une version édulcorée.
Seconde option ? Tout montrer, quitte à ce que tout cela ne soit
insoutenable pour ceux qui peinent évidemment à faire leur deuil. Mais
option ayant au moins le mérite de démontrer aux sceptiques que là, on a
fini de rigoler et que les gens qui entendent semer la terreur en
France ne sont pas exactement des plaisantins. Une fois de plus, ça se
discute.
Comme toujours, ou comme souvent, les autorités ont choisi, en
l’occurrence, de ne pas choisir. On peut s’en féliciter ou pas, railler
ces non-décisions ou non. Il n’empêche que tout cela pose de véritables
questions à nos sociétés occidentales et aux rapports qu’elles
entretiennent avec la mort et la représentation qu’on s’en fait. Si les
catholiques n’hésitent pas à montrer le Christ cloué en croix, les
protestants ne préfèrent garder que la croix, chassant ainsi un peu le
Christ de leurs temples. On n’assassine pas Vincent Lambert, on
l’accompagne seulement en fin de vie. On ne zigouille pas 200.000 petits
Français par an, on se contente de pratiquer quelques IVG.
Après, la représentation de la violence d’État, la seule qui soit
légale ? Il y a encore de quoi faire matière à débat. Sous l’Ancien
Régime, alors que la France n’était pas précisément régie par des
incultes et des sauvages, il y avait exécutions publiques et piloris
dans les places villageoises. La violence était alors mise en scène ; à
titre d’exemple social pour le mieux, ou de voyeurisme public les autres
jours.
La dernière exécution publique de France eut lieu le 17 juin
1939, lorsque Eugen Weidmann fut décapité à Paris, alors qu’une légende
tenace poussait encore certaines femmes à tremper leur mouchoir dans le
sang du défunt, juste histoire d’être ensuite plus hardie sous l’homme…
Il fut même dit qu’il s’agissait d’un agent hitlérien. Avant l’État
islamique, l’État nazi ou l’euthanasie…
L’occasion de se rappeler que le barbare, c’est toujours l’autre,
et que l’on n’a globalement rien inventé depuis que ce vaste monde
demeure, malgré ses inévitables convulsions, notre petit monde. Tout
petit.
Source: Boulevard Voltaire
Aucun commentaire:
Publier un commentaire