L'Oiseau frileux

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mardi, juillet 21, 2015

Hervé Cornara décapité : ce qu’il faut montrer ou pas

 
 
Inutile de s’appesantir davantage sur l’horreur, les faits parlant d’eux-mêmes : Hervé Cornara, paisible chef d’entreprise, décapité en Isère (France) par un fou furieux du nom de Yassin Salhi, au nom d’un califat islamique dont le moins qu’on puisse prétendre est qu’il n’a plus grand-chose de carnavalesque. Et ce dernier de se prendre en photo avec la tête du défunt et de faire circuler le tout sur les réseaux sociaux. D’où… polémique : les médias officiels doivent-ils ou non flouter le macabre trophée avant publication ?
 
Le parquet de Paris vient d’ouvrir une enquête à ce sujet. À leur façon, ces mêmes médias se sont aussi interrogés. Que faire ? Flou ou pas flou ? Montrer l’épouvante ou la dissimuler ? Pour l’instant, c’est flou.
 
Il est un fait que devant tel dilemme, il n’est pas illicite de barguigner, quels que soient les objectifs, réels ou supposés, des protagonistes en question.
 
Première option ? Adoucir l’affaire, quitte à l’affadir, afin que veuve et orphelins n’aient pas à supporter la vue d’une tête tranchée, celle du mari, celle du père. Là, il est possible d’atténuer le légitime chagrin ; mais du drame ne demeure plus qu’une version édulcorée.
 
Seconde option ? Tout montrer, quitte à ce que tout cela ne soit insoutenable pour ceux qui peinent évidemment à faire leur deuil. Mais option ayant au moins le mérite de démontrer aux sceptiques que là, on a fini de rigoler et que les gens qui entendent semer la terreur en France ne sont pas exactement des plaisantins. Une fois de plus, ça se discute.
 
Comme toujours, ou comme souvent, les autorités ont choisi, en l’occurrence, de ne pas choisir. On peut s’en féliciter ou pas, railler ces non-décisions ou non. Il n’empêche que tout cela pose de véritables questions à nos sociétés occidentales et aux rapports qu’elles entretiennent avec la mort et la représentation qu’on s’en fait. Si les catholiques n’hésitent pas à montrer le Christ cloué en croix, les protestants ne préfèrent garder que la croix, chassant ainsi un peu le Christ de leurs temples. On n’assassine pas Vincent Lambert, on l’accompagne seulement en fin de vie. On ne zigouille pas 200.000 petits Français par an, on se contente de pratiquer quelques IVG.
Après, la représentation de la violence d’État, la seule qui soit légale ? Il y a encore de quoi faire matière à débat. Sous l’Ancien Régime, alors que la France n’était pas précisément régie par des incultes et des sauvages, il y avait exécutions publiques et piloris dans les places villageoises. La violence était alors mise en scène ; à titre d’exemple social pour le mieux, ou de voyeurisme public les autres jours.
 
La dernière exécution publique de France eut lieu le 17 juin 1939, lorsque Eugen Weidmann fut décapité à Paris, alors qu’une légende tenace poussait encore certaines femmes à tremper leur mouchoir dans le sang du défunt, juste histoire d’être ensuite plus hardie sous l’homme… Il fut même dit qu’il s’agissait d’un agent hitlérien. Avant l’État islamique, l’État nazi ou l’euthanasie…
L’occasion de se rappeler que le barbare, c’est toujours l’autre, et que l’on n’a globalement rien inventé depuis que ce vaste monde demeure, malgré ses inévitables convulsions, notre petit monde. Tout petit.
 
Source: Boulevard Voltaire

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