L'Oiseau frileux

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vendredi, août 30, 2013

Musique classique: Angèle Dubeau après le sillence


Angèle Dubeau

Christophe Huss
30 août 2013
Le Devoir

C’est dimanche, à l’occasion de la 15e Fête de la musique à Tremblant, dont elle est la fondatrice et directrice artistique, qu’Angèle Dubeau reprendra pour la première fois sur scène son violon, qu’elle avait abandonné pour soigner un cancer du sein.

« Mes bras seront-ils corrects ? Vais-je pouvoir rejouer du violon ? », furent les premières pensées d’Angèle Dubeau en se réveillant de son opération. « Et là j’ai bougé les doigts, puis jour après jour, les bras se sont relevés de plus en plus. »

« J’ai fait tellement d’exercices pour revenir rapidement… » Avec sa discipline de violoniste, Angèle Dubeau a mis les bouchées doubles : « À la fin de la première semaine, j’étais déjà rendue à la deuxième semaine et demie dans le cahier d’exercices. Avec les médicaments contre la douleur, je savais que 20 minutes après la prise, la douleur serait moins présente. C’est là que j’entamais le travail… »

L’objectif était de retrouver au plus vite l’amplitude de mouvement des bras. « Lorsque j’ai commencé à jouer du violon pour moi, je me suis aperçue que tout allait bien, mais que je n’avais plus la même concentration. La lecture de la musique était plus lente. » La tête était encore un peu ailleurs, car la violoniste a dû suivre des traitements de radiothérapie après l’opération.

« En juin, j’ai commencé à reprendre vraiment. Depuis juillet, c’est quotidien. Aujourd’hui, personne - même moi - ne voit de différence avec avant. » À un détail près : « Quand j’ai repris le violon, je m’émouvais moi-même dans ma chambre. Les premières fois que j’ai joué, il y avait un débordement d’émotion ; le vibrato était intense ! »

Essentialisme musical

« Jamais je n’ai pensé à la mort. » Angèle Dubeau avait confiance, mue par son obsession de retrouver sa force au plus vite. Lorsque le violon était au rancart, elle a beaucoup écouté de musique, avec une période d’immersion marquante dans la musique d’Arvo Pärt. « C’était le moment où cette cathédrale intérieure m’apportait une sorte de paix », dit-elle du compositeur estonien qui définit sa musique comme « essentialiste ».

De toutes ses écoutes de « beaucoup de musiques », la violoniste a tiré les projets de quatre ou cinq albums. Mais elle ne va pas se ruer pour les enregistrer. Un par an, pas plus, et le prochain - top secret quant au contenu - en novembre. Pour la suite, Angèle Dubeau va « laisser décanter et réécouter », afin de valider ses idées et éviter qu’elles ne soient trop uniformément liées à un état d’âme en lien avec la maladie.

Pendant toute cette période, Angèle Dubeau a aussi profité d’une denrée rare : le temps. « Certes pas du temps de liberté et de qualité », précise-t-elle, mais un moment pour planifier le futur : « Je vais m’accorder un peu plus de temps et changer mon alimentation. Pour le reste, je ne peux pas faire mieux. J’adore mon métier et je piaffe d’impatience de monter sur la scène dimanche. »

Le timing du retour est parfait « Il y a un mois, cela aurait été trop tôt », avoue la violoniste. Et puis, « il n’y a pas un meilleur endroit pour moi que la Fête de la musique. C’est un bébé dont je suis très fière. Je connais l’ambiance, le cadre, je m’y sens bien et c’est le reflet de ce que j’ai toujours prôné : la musique pour tous. »

À Tremblant, cette fin de semaine, on retrouvera le concept multigenres avec des artistes d’ici. Pendant son repos forcé et ses séances d’écoute, Angèle Dubeau a fait des découvertes, car chacun des artistes qui se retrouvent à la Fête de la musique a été écouté et choisi par elle. Pour cette édition 2013, outre ceux pour Marie-Pierre Arthur et Karim Ouellet, partagés avec Espace musique qui en a fait ses Révélations (en concert samedi à 20 h), ses coups de foudre particuliers vont à Tehran Project, des musiciens persans qui se produiront samedi à 14 h 30, et au Lemon Bucket Orchestra (une fusion folk, tsigane et klezmer), sur scène dimanche à 17 h 30, deux heures avant son retour, avec La Pietà.

Montréal retrouvera Angèle Dubeau et La Pietà le 27 septembre à la salle Bourgie. Répertoire : Philip Glass, Arvo Pärt, des compositeurs déjà abordés, mais ici avec de nouvelles oeuvres
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