Une enseignante montréalaise qui s'affiche nue sur le site web MySpace, y étale ses préférences sexuelles et invite ses élèves à consulter le tout: plusieurs jeunes y ont cru. Et la direction de son école aurait bien pu les imiter lorsqu'un parent outré lui a transmis près d'une dizaine de photos compromettantes.
L'adresse, le lieu de travail et le salaire de la jeune femme (que nous appellerons Anne) avaient beau être exacts, son profil avait pourtant été fabriqué de toutes pièces, quelques semaines après une rupture ayant mal tourné.
Dans une autre école de Montréal, Sonia, une autre enseignante, a pour sa part découvert par pur hasard une page Facebook destinée à la haïr. On y montrait une femme nue, souffrant d'obésité morbide et allongée sur un lit. Sous cette photo, qui n'était pas la sienne, une soixantaine de commentaires cinglants la taillaient en pièces. «Pourvu qu'elle se suicide», a même écrit un élève.
«Quand ça arrive, c'est un séisme. La honte. J'ai développé un traumatisme par rapport à l'internet», nous a confié l'enseignante quelques mois après sa découverte.
Un an après sa propre humiliation, Anne demeure tout aussi bouleversée. «C'est un viol complet, dit-elle. J'ai voulu mourir. J'ai arrêté de travailler, alors que je dois faire vivre mes deux enfants. Je veux retourner en classe, mais je vis dans la peur que cette histoire me rattrape.»
Deux enseignantes, deux histoires, le même constat d'impuissance. Car la police ne peut apparemment rien pour elles - ni pour plusieurs autres Montréalais qui vivent la même chose chaque année. «L'enquêteur m'a dit de procéder au civil, s'indigne Anne. Mais comment puis-je monter ma preuve moi-même quand tout a été fait de façon anonyme?»
Outrée devant l'impunité des cyberagresseurs, la jeune femme a créé un blogue et une page Facebook pour que les victimes se liguent et fassent moderniser les lois.
«L'internet m'a détruite, et je vais maintenant m'en servir pour me défendre, dit-elle. Il y a une grosse faille dans le système depuis que les médias sociaux nous ont fait perdre le contrôle de notre vie privée. N'importe qui peut mettre des photos de toi saoule dans un party: ton employeur va les voir et peut-être te renvoyer. Le droit n'est pas adapté aux nouvelles réalités.»
Sur la Toile, on n'a pas à chercher très loin pour trouver semblables cris du coeur et groupes de soutien. Car les faux profils et autres campagnes de salissage sont innombrables. «On reçoit environ 70 appels par semaine à ce sujet, et ça ne cesse d'augmenter. Des tas de vie sont détruites, parfois de façon permanente», révèle en entrevue l'ancien policier et détective privé américain Bruce Anderson, qui a ouvert, il y a un an, une société spécialisée en cyberenquêtes, ReputationDefenseOnline.com.
«Quand les gens en arrivent à nous appeler, la situation est critique, précise-t-il. Ils ont perdu le sommeil et leur emploi parce qu'ils font face à des sociopathes qui se sont donné pour mission de les détruire.»
Des entreprises diffamées par des clients, des employés ou des concurrents représentent environ 40% de sa clientèle. Les nombreux individus qu'il aide le reste du temps sont généralement connus ou fortunés: mannequins, PDG, etc. Faute de moyens, les gens ordinaires n'ont nulle part où aller, déplore-t-il, sauf lorsque l'affaire est très grave.
«Il y a un vide immense. Plusieurs avocats ne savent pas comment procéder devant les attaques anonymes. Le FBI est trop occupé à enquêter sur des crimes plus menaçants pour la sécurité du pays. Et la police locale n'a pas assez de ressources pour s'occuper de ces dossiers. À moins qu'ils n'impliquent des sommes importantes ou une figure publique susceptible de la faire bien paraître...»
Cyberpresse ICI
Illustration: Veronica Pérez-Tejeda, La Presse
L'adresse, le lieu de travail et le salaire de la jeune femme (que nous appellerons Anne) avaient beau être exacts, son profil avait pourtant été fabriqué de toutes pièces, quelques semaines après une rupture ayant mal tourné.
Dans une autre école de Montréal, Sonia, une autre enseignante, a pour sa part découvert par pur hasard une page Facebook destinée à la haïr. On y montrait une femme nue, souffrant d'obésité morbide et allongée sur un lit. Sous cette photo, qui n'était pas la sienne, une soixantaine de commentaires cinglants la taillaient en pièces. «Pourvu qu'elle se suicide», a même écrit un élève.
«Quand ça arrive, c'est un séisme. La honte. J'ai développé un traumatisme par rapport à l'internet», nous a confié l'enseignante quelques mois après sa découverte.
Un an après sa propre humiliation, Anne demeure tout aussi bouleversée. «C'est un viol complet, dit-elle. J'ai voulu mourir. J'ai arrêté de travailler, alors que je dois faire vivre mes deux enfants. Je veux retourner en classe, mais je vis dans la peur que cette histoire me rattrape.»
Deux enseignantes, deux histoires, le même constat d'impuissance. Car la police ne peut apparemment rien pour elles - ni pour plusieurs autres Montréalais qui vivent la même chose chaque année. «L'enquêteur m'a dit de procéder au civil, s'indigne Anne. Mais comment puis-je monter ma preuve moi-même quand tout a été fait de façon anonyme?»
Outrée devant l'impunité des cyberagresseurs, la jeune femme a créé un blogue et une page Facebook pour que les victimes se liguent et fassent moderniser les lois.
«L'internet m'a détruite, et je vais maintenant m'en servir pour me défendre, dit-elle. Il y a une grosse faille dans le système depuis que les médias sociaux nous ont fait perdre le contrôle de notre vie privée. N'importe qui peut mettre des photos de toi saoule dans un party: ton employeur va les voir et peut-être te renvoyer. Le droit n'est pas adapté aux nouvelles réalités.»
Sur la Toile, on n'a pas à chercher très loin pour trouver semblables cris du coeur et groupes de soutien. Car les faux profils et autres campagnes de salissage sont innombrables. «On reçoit environ 70 appels par semaine à ce sujet, et ça ne cesse d'augmenter. Des tas de vie sont détruites, parfois de façon permanente», révèle en entrevue l'ancien policier et détective privé américain Bruce Anderson, qui a ouvert, il y a un an, une société spécialisée en cyberenquêtes, ReputationDefenseOnline.com.
«Quand les gens en arrivent à nous appeler, la situation est critique, précise-t-il. Ils ont perdu le sommeil et leur emploi parce qu'ils font face à des sociopathes qui se sont donné pour mission de les détruire.»
Des entreprises diffamées par des clients, des employés ou des concurrents représentent environ 40% de sa clientèle. Les nombreux individus qu'il aide le reste du temps sont généralement connus ou fortunés: mannequins, PDG, etc. Faute de moyens, les gens ordinaires n'ont nulle part où aller, déplore-t-il, sauf lorsque l'affaire est très grave.
«Il y a un vide immense. Plusieurs avocats ne savent pas comment procéder devant les attaques anonymes. Le FBI est trop occupé à enquêter sur des crimes plus menaçants pour la sécurité du pays. Et la police locale n'a pas assez de ressources pour s'occuper de ces dossiers. À moins qu'ils n'impliquent des sommes importantes ou une figure publique susceptible de la faire bien paraître...»
Cyberpresse ICI
Illustration: Veronica Pérez-Tejeda, La Presse
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